Outre les « familles olfactives », qu’il est bon de connaître quand on veut tâter de la composition, il est une classification assez cruciale des matières, déterminante quant à la sensation olfactive qu’elle procurent (et par là la construction de la fragrance) : la classification par évaporation. Intensité de l’odeur, « volume » et ténacité – sur la peau par exemple. Si l’on se plonge un peu dans les arcanes de la chose, on parle assez vite de « pression de vapeur » et autre densités relatives. Physique et chimie, donc. Normal : il s’agit de voir comment des molécules se comportent à l’interface liquide/air. Voir comment et à quelle vitesse elles vont parvenir à notre nez. Comment ça va diffuser. La moindre des choses si l’on veut parvenir à équilibrer nos fragrances avec une dynamique acceptable.
Et là, vraiment, c’est la jungle. Impossible d’y voir clair avec précision si on cherche des informations en ligne. On ne peut que se fier à sa propre expérience. (C’est d’ailleurs là que ce mot prend tout son sens.)
En effet, si les fabricants (Firmenich, IFF et autres Bedoukian) fournissent sympathiquement des pdf à télécharger, pleins de renseignements qualitatifs sur ce qu’il vendent, il faut se rendre à l’évidence : dès qu’on parle d’évaporation, tenacité, cinétique, etc., il est impossible de savoir dans quelles conditions les expériences ont été conduites. Donc les infos sont à prendre avec des pincettes car à relativiser. Prenons le cas de la Calone, par exemple, une molécule de type « marine ». Firmenich nous donne « deux jours » pour la ténacité (ce qui paraît fort court), alors que Good Scents company, base de donnée géante en ligne – par ailleurs très complète et constamment mise à jour – donne « plus de 600 heures », un petit mois quoi (!)… Sur d’autres sites, les infos sur la Calone sont encore différentes. Chacun y va de sa petite musique, selon son propre barème. 80 heures ici, 150 heures là… sur DPG, sur ceci ou cela… Tête ? coeur ? fond ? On n’en sait rien au final. Alors ? Ténacité ou pas ténacité, la Calone ? Sais pas. Faut essayer ! (Pour ma part, diluée à 5% sur éthanol, la Calone, avec un départ « middle », est restée perceptible une petite semaine sur touche.)
Il en est de même pour toutes les matières, c’est la zone, on est sûr de rien ; même si l’on sait que certaines familles, comme les muscs, restent plusieurs jours voire semaines ; que les hespéridés ont tendance à être intenses mais brefs, etc. Aucune information n’est réellement comparable, donc fiable. On peut se demander pourquoi.
La réponse est simple : Il n’y a aucune normalisation procédurale entre les acteurs de ce petit monde. Pour être fixé et avoir des valeurs relatives fiables, il faudrait procéder exactement de la même manière avec toutes les matières.
– Touches de la même qualité ;
– Nb de gouttes déposée identiques pour chaque matière (ben oui, si tu déposes juste une goutte ou que tu trempes ta touche jusqu’au tiers, ça n’a rien à voir…) ;
– Même concentration pour chaque matière (en effet, évaluer la ténacité et la puissance à 1, 10 ou 100% est très différent !…) ;
– Température de la pièce ou se déroule l’expérience stable ;
– Diluant identique pour toutes les matières.
– Seuil de perception olfactif déterminé, étalonné et constant. Au mieux : nez électronique.
Mener une expérience de façon scientifique, donc. Homologuée entre les entreprises. Ben oui.
Là on est loin du compte, globalement, malgré la bonne volonté des chimistes… C’est ce qui fait le charme de la parfumerie 🙂
Si on n’a pas la chance de pouvoir se procurer toutes ses matières chez le même fournisseur (qui livre des infos relatives assez fiables car expérimentées en système interne), il n’y a rien d’autre à faire qu’expérimenter soi-même, matière après matière, et se faire sa propre idée sur les relations cinétiques entre les différents produits. On se rend compte, par exemple,que les salicylates fonctionnent un peu de la même façon, les aldéhydes aussi, etc. On fait des groupes, on teste. On attend pour voir. C’est de l’empirisme à la petite cuillère et au doigt mouillé, ça prend du temps mais ça marche. En fait il faut créer ses propres repères. Autant dire que, si l’on veut travailler un peu sérieusement, la patience et la persévérance ne sont pas de vains mots. Mais quand on aime, hein.
Bon courage 😉
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Besides the « olfactive families » that is good to know when you want to build fragrances, it is a pretty crucial classification of materials, determinative in the olfactory sensation that provide (and hence the construction of the fragrance ): Classification by evaporation. Odor intensity, « volume » and tenacity – on the skin for example. If we dig a little into the mysteries of the thing, « vapor pressure » and other « relative densities » come fast. Physics and chemistry, so. Normal: it is to see how molecules behave at the liquid / air interface. How and how quickly they will reach our noses. How it will spread. The very least if you want to achieve balance our fragrances with an acceptable dynamic.
And, really, it’s a jungle. Unable to see clearly with precision if looking for information online. We can only rely on his own experience – experiment. (This is also where these words makes sense.)
Indeed, if the manufacturers (Firmenich, IFF and other Bedoukian) sympathetically provide pdf files to download, full qualitative information on what they sell, you must go to the obvious: when we speak of evaporation, tenacity, kinetics, etc.., it is impossible to know under what conditions the experiments were conducted. Therefore the information should be taken with a grain of salt because in perspective. Consider the case of Calone for instance, a molecule of « marine » type. Firmenich gives us « two days » for the tenacity (which seems very short), while Good Scents company, a database giant online – also very comprehensive and constantly updated – gives « over 600 hours », about a month (!) … On other sites, information about the Calone are still different. Everyone has his own music, according to its own schedule. Here 80 hours, 150 hours on there … on DPG, on this or that … Head? heart? basenote? We know nothing in the end. So what ? Tenacity or not tenacity, Calone? Don’t know. Try! (For my part, diluted with 5% ethanol, Calone il a bit weak in the beginning, and perceptible, diffusive, a week long on a smelling strip.)
It is the same for all materials, an area we aren’t sure of anything, even if we know that some families, such as musk, stay for several days or even weeks, as citrus tend to be intense but brief, etc.. No information is actually comparable and therefore reliable. One may wonder why.
The answer is simple: There is no standardization between procedural players in this little world. To be fixed and have reliable relative values, there should be exactly the same with all material.
– Smelling strips of the same quality;
– Number of deposited drops identical for each material (yes, if you deposit just one or two drops or you dip the strip, it has nothing to do …)
– Same concentration for each meterial (in fact, evaluate the tenacity and strength at 1, 10 or 100% is very different! …)
– Room temperature where you experiment must be stable;
– Same dilutent for all materials.
– Determined, calibrated perception threshold. At best: electronic nose.
Conduct an experiment in a scientific way, then. Approved between companies. Well, yes.
Here we are far from overall, despite the willingness of chemists … It is what makes the charm of perfumery 😉
If you do not have the chance to get all materials from the same supplier (that delivers information on reliable enough because experienced in-house system), there is nothing else to do self-experimenting and make up his own mind about kinetic relationships between the different products. We realize, for example, salicylates work much the same way, as aldehydes do, etc.. Groups and tests are made. We wait to see. It’s empiricism with a spoon and « wet finger », it takes time but it works. In fact we must create our own benchmarks. Suffice to say that if you want to work a little seriously, patience and perseverance are not empty words. But when you love, huh.
Good luck 🙂